Métier – Directrice Innovation et Entreprenariat dans un Impact Hub

J’ai trouvé la ligne directrice de ma vie : donner le pouvoir aux jeunes entrepreneurs d’avoir un impact social et environnemental au Cambodge.

Mélanie est Directrice de l’innovation et de l’entreprenariat dans un Impact Hub au Cambodge. Elle aide la nouvelle génération à contribuer au développement du pays de manière durable.

Son optimisme est communicatif ! Quelques soient les défis qu’elle rencontre, elle met toute son énergie pour agir et ainsi ne rien regretter.

Dans son métier, elle forme, coache et soutient les entrepreneurs pour les aider à faire avancer leurs projets. Elle transmet à son équipe l’envie de penser grand et de dépasser leurs limites.

Au quotidien, Mélanie voit des projets à impacts forts prendre vie. Elle est passionnée par son métier et est profondément convaincue que l’entreprise peut jouer un rôle dans le monde.

Un portrait inspirant, qui donne envie de bouger les choses à notre échelle !

Mélanie, tu es Directrice de l’innovation et de l’entreprenariat dans un Impact Hub. Le mot « impact » résonne en nous ! Mais peux-tu nous expliquer le concept exactement ?

Un Impact Hub est un espace de travail commun, qui rassemble des entrepreneurs sociaux. C’est un endroit destiné à :

–   Inspirer les entrepreneurs incubés : des tas d’idées innovantes et impactantes fusent au sein de l’incubateur

–   Connecter : des évènements et partenariats sont organisés pour permettre aux membres de se faire connaître et d’accéder aux ressources dont ils ont besoin

–   Rendre possible : différents programmes sont à disposition des entrepreneurs en fonction de l’avancement de leurs projets. Le but est de les nourrir, former et les accompagner pour que tout puisse prendre vie

Génial, tu dois côtoyer des personnes très inspirantes au quotidien ! Peux-tu nous décrire ton Impact Hub au Cambodge?

Depuis sa création, l’Impact Hub de Phnom Penh a accompagné plus de 650 jeunes cambodgiens et 60 à 80 start-ups ont émergé de nos programmes.

Le Cambodge est un petit pays (presque de la taille de la Belgique). Et c’est surtout un pays très jeune. 68% de la population a moins de 30 ans. C’est donc hyper important de soutenir ces jeunes qui ont le pouvoir de changer le futur du pays.

C’est fascinant de travailler dans ce secteur car je suis en contact avec les pionniers du Cambodge. Voici quelques exemples de projets que nos incubés ont lancé:

  • Digitaliser le système de santé au Cambodge
  • Donner l’accès aux logements grâce à la construction de maisons en briques « lego », séchées au soleil
  • La création de serviettes hygiéniques réutilisables  
  • Mettre en place des systèmes de compost pour les particuliers

Ton Impact Hub donne en quelque sorte les clés pour réaliser des projets destinés à améliorer le pays ! Quel est ton rôle au sein de la structure ?

Mon rôle est de former, coacher et aider les entrepreneurs à identifier leurs besoins, les mettre en relation avec des opportunités et les aider à avancer.

Au Cambodge, il y a un vrai potentiel pour former les jeunes talents. Nous sommes d’ailleurs en train de développer un cours d’entrepreneuriat. Il sera accrédité par le Ministère de l’Éducation du Cambodge. L’année prochaine, nous lancerons un pilote dans 10 universités et notre objectif à terme est de le rendre disponible dans les 30 universités du pays.

J’adore créer cette culture entrepreneuriale. Il y a peu de barrières légales ici, ce qui nous laisse un beau potentiel pour innover. Je suis tous les jours au contact de jeunes qui veulent faire avancer leur pays. C’est hyper stimulant et valorisant.

As-tu un exemple de missions que tu fais au quotidien ?

Ce qui est sûr, c’est que je n’ai pas de semaine type !

Une partie de mes journées est rythmée par la rencontre des entrepreneurs. J’essaie de comprendre leurs besoins, de recommander des plans d’actions et de les mettre en contact avec d’autres personnes ou des médias.

Puis une autre partie de mon métier consiste à faire la communication de notre écosystème à l’international. Je fais la promotion de projets sur les réseaux sociaux, je participe à des évènements en Asie du Sud-Est et je planifie des événements dans le pays également.

Par exemple, en ce moment, j’organise un programme d’incubation pour soutenir des startups locales focus sur le tourisme domestique.

J’ai eu l’idée de faire le pitch final dans le temple d’Angkor.  Au début, j’avais du mal à imaginer que nous serions autorisés.

Mais il faut savoir que ma façon de voir la vie est de toujours tenter ! Qu’est-ce que je risque ? Au pire, ça marche !

Alors j’ai tenté. Et mon idée a été acceptée !

C’est fou, les jeunes entrepreneurs vont pouvoir pitcher au sein du temple. C’est une opportunité unique dont on se souviendra sûrement toujours, et j’espère que leurs innovations et leur passion pourront redonner de l’espoir a un secteur qui a énormément souffert depuis la fermeture de nos frontières aux touristes depuis Mars 2020. 

Je trouve cela vraiment inspirant que tu n’aies pas peur de foncer et que tu ne te mettes pas de barrières ! Quel a été ton parcours pour en arriver là aujourd’hui ?

Je suis arrivée là parce qu’il s’est passé plein de choses avant.

On ne peut pas dire qu’il y ait un parcours tout tracé pour devenir directrice d’un Impact Hub.

J’ai fait une école de commerce, l’IESEG, et son master en entrepreneuriat.

J’ai eu la chance de faire partie d’associations, dont Enactus, qui m’ont mis le pied dans l’entrepreneuriat. J’ai développé un attrait grandissant pour l’ESS (Economie Sociale et Solidaire) et rencontré des personnes qui m’ont guidé dans mes premiers pas de ma carrière, grâce à leur positivisme, leur optimisme et surtout leur énergie.

Pendant mes études, j’ai également lu le livre de Matthieu Dardaillon « À la rencontre des entrepreneurs qui changent le monde». Ce livre m’a énormément touchée, et surtout inspirée ! Je savais dès ce moment que je voudrais travailler dans une entreprise qui souhaite améliorer le monde ! C’est ce livre qui a guidé toute ma vie ensuite.

Puis, un jour, un copain m’a dit le mot « Impact Hub ». J’ai regardé sur Google ce que c’était et je me suis dit « wow c’est incroyable ». Il y en avait 80 dans le monde. En 1 nuit, j’ai envoyé des mails aux 80 hubs.

Je suis allée dormir et le lendemain, j’ai reçu un email. C’était l’Impact Hub de Phnom Penh qui me disait, on t’attend dans 1 mois !

J’ai commencé alors un stage en communication, en tant que community builder. Puis je ne suis jamais repartie !

Aujourd’hui cela fait 5 ans que je suis ici, et depuis 3 ans j’ai repris la direction et je suis devenue une des shareholders d’Impact Hub Phnom Penh. 

Tu ne connaissais rien du Cambodge et tu venais à peine de découvrir le concept d’un Impact Hub. Qu’est-ce qui a fait que ta candidature a été retenue selon toi ?

Je crois sincèrement que rien n’arrive par hasard.

Avant le Cambodge, j’ai vécu des expériences incroyables. Et surtout, avec passion. Je pense que la passion ne ment pas. Cela a dû se ressentir dans ma candidature.

Par exemple, lorsque j’étais en école de commerce, j’ai participé au concours pour définir la vision 2025 de l’école.

J’ai adoré l’expérience et j’ai gagné le premier prix ! C’était un voyage pour apprendre. Je voulais absolument visiter le Barefoot College en Inde. C’est un endroit où des grands-mères illettrées sont formées à devenir ingénieures solaires. Ces femmes sont ultra-influentes et motivées pour changer leurs villages.

Le principe de cette école repose sur la pédagogie du « learning by doing ». Ces grands-mères vont acquérir de la connaissance, qu’elles transmettront aux générations d’en dessous, pour faire perdurer la connaissance.

C’était une expérience tellement enrichissante !

Aujourd’hui en tant que Directrice de l’Innovation dans un Impact Hub, tu rencontres des entrepreneurs qui ont une motivation très forte de changer les choses au Cambodge. Tu as dû vivre des expériences mémorables ?

Oui, environ un an et demi après mon arrivée dans le pays, j’ai aidé un de nos entrepreneurs à participer à une compétition de start-ups sociales en Inde. Son projet a été sélectionné dans le top 15. C’était fou, une opportunité unique de présenter son projet. Nous étions très fiers de lui! 

Mais coup de théâtre, son visa pour partir en Inde fut refusé. Il m’a alors proposé de le représenter à sa place. Même si ce n’était pas l’idéal, c’est la seule option que nous ayons trouvée. J’étais très stressée! C’était la première fois qu’un entrepreneur cambodgien pouvait présenter son projet en dehors de son pays natal. Je n’avais jamais pitché de ma vie, j’étais terrorisée, mais ça s’est très bien passé et je suis heureuse d’avoir pu représenter le Cambodge sur la scène internationale.

Est-ce qu’il t’arrive aussi d’avoir des coups durs ?

Pendant mes premières années au Cambodge, j’avais le syndrome de l’imposteur.

Je me disais : je suis trop jeune, je n’ai jamais monté de boîte, je ne suis pas cambodgienne.

C’était difficile, je ne me sentais pas légitime.

Mais je me suis dit : comment puis-je transformer cela en une force ?

Finalement, le fait d’être étrangère m’a aidé. Je me suis mise à apprendre le Khmer et cela m’a rendue plus accessible, et m’a aidé à comprendre les challenges des entrepreneurs cambodgiens.

Et j’ai aussi réalisé qu’Impact Hub est en fait une startup qui aide des startups, et lorsque j’ai pris la direction d’Impact Hub, j’ai pu vraiment comprendre le feeling et la responsabilité de gérer une entreprise.

J’ai donné beaucoup pour aller au fond des choses.

Mon succès vient de ma passion pour ce que je fais. Je suis convaincue qu’avec de l’optimisme et des actions, nous pouvons apporter une petite pierre à l’édifice.

Never doubt that a small group of citizens can change the world

Margaret Mead

En revanche, c’est très important de savoir prendre du recul sur son implication.

Parfois la pression de bien faire est tellement forte que je n’arrive plus à gérer. J’ai frôlé le burn-out. J’étais si passionnée, que chaque injustice ou lenteur du système me dévastait. Mon entourage a joué un rôle très important à ce moment.

Tu as l’air si investie, qu’est-ce qui te donne cette force et l’envie de te lever le matin ?

Je suis fascinée par ce pays et toutes les opportunités qu’il apporte.

Ma vie ici est une aventure.

Par exemple, je rêve de développer le concept du train Jagriti Yatra indien, au Cambodge. C’est un concept incroyable ! Un train, 12 destinations, des centaines de participants, dans le but de transformer son pays grâce à l’entreprenariat.

Ce train est mon inspiration. J’ai vécu l’expérience indienne. Pendant 15 jours, j’animais un groupe de 6 filles dans le but de discuter, inspirer et les aider à faire vivre leurs projets. C’était intense, riche d’apprentissages et de rencontres. Je suis allée au bout de mes limites, mais cela m’a donné une autre ambition.

J’attends maintenant le bon moment pour mettre en place ce voyage au Cambodge.

Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui cherche du travail dans un impact hub ?

1)  Participez à des événements de MakeSense, Ticket for Change! Inscrivez-vous dans des associations. Bref, soyez curieux et actifs ! C’est comme ça que l’expérience se crée.

2) Définissez le cadre de travail qui vous stimule, foncez, envoyez une candidature spontanée et personnalisée! Les personnes qui montrent que c’est leur rêve de bosser avec nous, qui n’ont pas peur d’être pro-actives, ont plus de chance d’être recrutées. 

3) Choisissez un manager, pas juste une entreprise. Quelqu’un qui vous fera grandir et vous soutiendra, vous aidera à vous développer dans votre carrière. Si je suis devenue directrice aujourd’hui, c’est grâce aux managers que j’ai eus, qui m’ont fait confiance !

Mon mot de la fin:

Be the change you want to see in the world

Gandhi